Cambodge avec Tiphaine et Nicolas !
Ca y est ! Nous voici dans le dernier pays de notre grand voyage ! La date du retour approche à grands pas…
Après avoir passé la frontière chaotique du sud Laos au Cambodge, et évité de payer tous les bakchichs réclamés à tort et à travers, nous descendons de Stung Treng à Phnom Penh en huit longues heures de bus. Dans la capitale, nous nous posons dans une guesthouse conseillée par notre guide, car « jouissant d’une vue imprenable » sur le lac Boeng Kak, au nord de la ville. Vue imprenable, c’est le mot ! Car à notre grande surprise, le lac n’existe plus, asséché depuis l’an dernier en vue d’un projet de construction de grande ampleur, visant à redynamiser le quartier…
Cependant, le quartier « du lac » est plutôt calme, puisqu’en retrait de la circulation trépidante du centre.
En attendant le plaisir de tous vous retrouver bientôt, pour le moment, c’est Tiphaine que nous serrons dans nos bras la première, puisqu’elle vient découvrir le Cambodge avec nous ! ;)
Après avoir bien profité de la belle vue de notre guesthouse, dégusté ensemble le bon camembert, le magret fumé, le foie gras de la mama, le Bayonne, et bu le Montbazillac que Tiphaine nous a amenés, nous partons ensemble arpenter les rues de Phnom Penh, et le marché central, à l’architecture en dôme original.
On nous avait prévenus : au Cambodge, les insectes grillés se dégustent tels des friandises… Avis aux amateurs !
Une fois Tiphaine ayant un peu récupéré du décalage horaire, nous partons vers le sud et la jolie ville de Kampot. Nous posons nos sacs dans une agréable guesthouse, au bord de la rivière. Autrefois, les colons français avaient bâti une station de villégiature au sommet de la colline du Bokor qui surplombe Kampot (désormais un parc national). Nous nous y rendons en moto, dans l’optique d’y passer une nuit.
Sur place, surprise ! les ruines vestiges de l’occupation française, un peu glauques, se partagent l’espace avec de gros camions, et des grues de construction… A croire que le Cambodge est lancé dans une politique de grands travaux ! Car ici aussi, il s’agit de la construction d’un grand domaine avec casino, hotels, et résidences…
Seconde surprise, la guesthouse du Bokor dans laquelle nous comptions passer la nuit, n’existe plus. Nous demandons l’asile dans la pagode de la colline : les moines acceptent et nous installent des nattes de bambou tressées dans le temple. Nuit inédite depuis le début du voyage : nous allons dormir au pied de Bouddha ! ;)
Afin de s’offrir à nouveau un apéro frenchie, nous nous trouvons un abri aux rafales de vent du sommet qui soufflent à décorner les buffles. Face à nous, l’île vietnamienne de Phu Quoc, que les deux pays se sont longuement disputée.
Le soir, nous passons la soirée avec un groupe de jeunes Cambodgiens, invités eux aussi par les moines à dormir au temple. La plupart d’entre eux découvre le parc national du Bokor pour la première fois, alors qu’ils ont toujours vécu à Kampot (à juste 30 km de là). Pour beaucoup, ce lieu reste en mémoire comme le dernier refuge des Khmers Rouges à l’arrivée des troupes Vietnamiennes venues les combattre en 1979. Les jeunes finiront d’ailleurs par dormir dehors, plutôt que dans le temple, persuadés d’y avoir entendu des fantômes… Les fantômes, heureusement, nous laissent tranquilles, en revanche, un jeune macaque se plait à épouiller la barbe de Maxime, et grimper sur la tète d’Anne Laure pour lui retirer sa capuche…
Le lendemain de notre nuit agitée par la tempête, nous partons en recherche des chutes d’eau Popokville, autour desquelles il est dit qu’un tigre à trois pattes aime se promener… Au final, des lézards - comme ce bel agame - et des chutes d’eau, mais pas de Tripède.
De retour à Kampot, nous retrouvons la famille chaleureuse de notre guesthouse, et organisons avec eux un cours de cuisine Khmer. D’abord, nous partons acheter nos ingrédients au marché…
..Puis chacun donne un coup de main à la patte pour préparer un poisson amok, une soupe traditionnelle khmer à base de nénuphars (si !si !) , de succulents rouleaux de printemps et un dessert lait de coco-citrouille au tapioca. Bien sûr, on déguste tout à la fin…
L’après midi, nous sommes tellement repus que nous partons couler dans le Lac Secret, à une dizaine de km de Kampot.
Rapide passage à Kep, qui fut la favorite de l’élite française début 1900, avec de belles villas, et une atmosphère balnéaire… Après que les Khmers Rouges aient fait évacuer la ville, de nos jours subsistent encore les traces de leur sanglant passage : maisons abandonnées sur lesquelles la végétation reprend ses droits, grands terrains vides dont ne restent que le portail et les clôtures du jardin … Heureusement, Kep aussi fait l’objet d’une grande reconstruction, et renaitra bientôt de ses cendres. On finit par braver la mer et ses embruns pour échapper au lourd passé khmer.
Juste en face, à 20minutes de traversée, nous voici sur la petite Rabbit Island.
Après deux jours de farniente, nous retournons vers la trépidante Phnom Penh, car nous avons un autre invité à retrouver : Nico, le mari de Tiphaine ! Premier diner tous les quatre sur les nattes du marché nocturne.
Histoire de mettre Nicolas directement dans le bain, nous partons visiter le Tuol Sleng, autrement appelé musée du génocide. Il s’agit d’un ancien lycée de Phnom Penh, reconverti en prison de haute sécurité sous le règne des Khmers Rouges. Les anciennes salles de classe sont devenues des salles de torture, tandis que des cellules de fortune ont été bâties dans les étages des bâtiments, quand les prisonniers n’étaient pas tout bonnement enchainés les uns aux autres, sur le sol. Tuol Sleng (S21) fut le plus grand centre de détention du Cambodge : entre 1975 et 1978, plus de 17000 personnes transitèrent entre ces murs, avant d’être tuées, soit sur place lors d’un interrogatoire, soit dans le camp d’extermination de Choeung Ek, à l’extérieur de la ville. La cruauté et la violence du régime de Pol Pot et sa clique fait froid dans le dos… Et dire que le jugement des anciens Khmers rouges se fait toujours attendre… Ce qui n’est pas des plus surprenant, étant donné le sentiment paradoxal des Cambodgiens à l’égard de ces sombres années (beaucoup avaient un ou plusieurs membres de leurs familles parmi les Khmers rouges, nombre d’adolescents ayant été enrôlés de force par le mouvement dans les années 70), et l’absence manifeste de devoir de mémoire de la part de la jeune génération est bien triste.
Histoire de se changer les idées, nous arpentons les rues de Phnom Penh, ente le marché russe, le palais royal…
C’est décidé, nous quittons la ville ! Plutôt que de nous rendre à Siem Reap en bus, nous optons pour la voie des flots et remontons le lac Tonle. Le trajet est aussi long qu’en bus, cependant, sur le bateau, nous, on squatte le toit !
A mesure que l’on s’éloigne de Phnom Penh, les maisons des villages flottants font leur apparition…
Siem Reap est une agréable ville, passage obligé pour toute personne désirant visiter le site spectaculaire d’Angkor. Du coup, la ville a connu un énorme essor, avec plus d’un million de visiteurs par an, et on y trouve même une rue des pubs, où l’on ne s’entend pas parler tant les bars rivalisent de décibels.
Parmi le million de visiteurs se trouve… Emilien ! Si si ! :)
Ensemble, on part faire un petit tour dans un des villages sur pilotis du lac Tonle Sap, Kompong Pluk, après une malheureuse déconvenue pour tenter de rejoindre la réserve ornitho de Prek Toal, d’accès à prix prohibitif !
Moins d’oiseaux que dans la réserve, c’est sûr, mais quelques Anhinga roux, entre autres, nous survolent.
Des petits groupes de Moineaux flavéoles fréquentent les arbustes.
On se fait une pause repas dans le village, voguons autour de la foret inondée du trop plein d’eau de la saison des pluies, pour terminer par une baignade en plein lac , à contre courant !
De retour à Siem Reap, nous louons des vélos pour aller nous promener 3 journées parmi les temples.
Notre première visite est vouée au temple principal, Angkor Wat, datant du 12ème siècle. Il fut érigé sous le règne du roi Suryavarman II à la gloire de Vishnu et de lui-même et aurait servi autant de temple religieux que de mausolée.
On y flâne longuement dans les nombreux couloirs, à admirer bas-reliefs, les Apsaras sacrées sculptées partout…
… parmi les hordes de touristes qui, comme nous, tentent d’avoir quelques photos vierges de présence humaine !
Pas moyen d’être seuls évidemment, et même au lever du jour, des dizaines de groupes attendent de pied ferme la lumière magique, pour finalement faire tous la même photo, bien sûr. Un peu déçus de ne pas trouver la tranquillité espérée, on repasse au coucher du soleil, alors que tous les groupes s’entassent sur la colline voisine.
La grande masse de visiteurs a immanquablement généré une horde de vendeurs en tout genre, souvent des enfants, cherchant à vendre des cartes postales, des copies de livres, des instruments de musique…
Deux kilomètres au nord d’Angkor Wat siège l’ancienne cité d’Angkor Thom, dont subsiste encore une partie des murs d’enceinte, en particulier les magnifiques portes aux figures énigmatiques.
Le Bayon en est l’un des principaux édifices (XIIe s). D’apparence assez modeste, on se perd dans son labyrinthe à multi-étage, entre voûtes incroyables, énormes visages sculptés et fresques interminables…Ce temple est d’une grande originalité, et son style est unique dans l’enceinte d’Angkor Thom, à la limite…baroque !
On retrouve d’autres amateurs de vieilles pierres : chauves souris, geckos et skinks… et dans les bassins, bien sur, des amphibiens !
Même si certaines rainettes se plaisent aussi bien au chaud !
Nous poursuivons ensuite notre promenade dans Angkor Thom, et grimpons les escaliers abruptes du Baphuon (XIe s), en forme de pyramide, avec un énorme Bouddha couché, ajouté au XVIe s, en relief sur la façade ouest.
De là haut, on observe le défilé des Perruches à moustache , des Eperviers shikras, tandis qu’un Pic sultan
s’époumone sur son perchoir.
Il en est de même depuis la haute pyramide du Takeo, dont les marches abruptes nous évoquent les hauteurs impressionnantes du Teotihuacàn du Mexique.
Les temples sont tous entourés par la forêt, ce qui permet de mêler visite et observation.
D’ailleurs, le chouchou de notre visite d’Angkor reste le Ta Prohm.
A peine entrevoit on ses ruines que le ton est donné : les racines des arbres Spong (« fromagers ») épousent et enserrent les murs et les pierres de façon tentaculaire, unissant la végétation luxuriante et des siècles d’histoire ensemble. Les conservateurs se sont mis d’accord sur le fait de ne pas toucher à ce monument pour laisser naitre l’impression ressentie par les explorateurs du XIXe siecle aux visiteurs d’aujourd’hui.
Quand vous y serez, essayez de retrouver cette petite apsara cachée !
Après cette belle étape à Siem Reap, nous roulons en taxi partagé jusqu’à Kompong Thom, puis Kompong Cham et enfin arrivons à Kratie, plus à l’est. Au Cambodge, quand on parle de « taxi partagé », c’est du sérieux, du covoiturage poussé à l’extrême… Même le chauffeur est prêt à faire une petite place sur son siège à un voyageur supplémentaire… Ce jour là, dans la voiture, (enfants, adultes, et notre conducteur y compris), nous étions onze.
Mais nous sommes arrivés à bon port et avons pu aller voir les dauphins de l’Irrawaddy le soir même. Après les avoir guetté sans trop y croire en Birmanie, puis au Laos, les voila qui s’offrent à nos jumelles presque trop facilement ! Il faut préciser qu’en cette période de l’année, la saison sèche débute, les eaux du Mékong diminuent, et la zone profonde à une quinzaine de kilomètres de Kratie offre les conditions parfaites aux femelles pour avoir leur petit. C’est ainsi qu’une petite colonie de dauphins demeure dans le coin.
Nous sommes arrivés au meilleur créneau : les dauphins chassent juste avant la tombée de la nuit, envoyant valdinguer de petits poissons d’un grand coup de nageoire, histoire de les assommer et les désorienter pour pouvoir les croquer plus facilement. On en prend plein les yeux jusqu’au coucher du soleil sur le Mékong.
Le lendemain, nous avons rendez-vous avec les élèves de troisième du lycée de Sambok, sollicités par Sirivat, un prof de khmer et d’anglais, pour que nous donnions le cours à sa place. Tiphaine et Anne-Laure se prêtent au jeu deux heures durant, à coup de lecture, et grand renfort de dessins, histoire que tout le monde comprenne bien.
Sur nos motos, nous partons découvrir les environs ; le petit village de Sambor, la pagode aux 108 colonnes, autrefois entièrement détruite par les Khmers Rouges, de nouveau sur pied aujourd’hui…
On parvient à arranger une barque à moteur pour aller marcher sur l’ile de Kho Pdao, qui fait face à Sambor. La traversée est plus longue qu’escomptée : notre boatman longe la berge sur des kilomètres et des kilomètres, sans jamais parvenir « au bout » ! Alors, pour se protéger du fort soleil qui tape, chacun son style !
Le long des berges, on dérange quelques Alcyons pies et Martins-chasseurs à coiffe noire
Mais le clou ornitho est sans hésiter la Bergeronnette du Mékong, endémique du bas Mékong !
Enfin, nous accostons. Kho Pdao est très longue (environ 45km de long), et peuplée tout le long de ses berges. Les maisons de bois perchées sur leurs pilotis offrent un grand espace ombragé, il n’est pas rare de trouver des hamacs accrochés « sous » la baraque. L’intérieur de l’île est voué aux cultures ou à la végétation.
La vie sur l’ile est essentiellement rurale. Les gamins, nombreux, jouent sur le chemin…
Les Pouillots bruns sont partout, tandis qu’un Souimanga à dos vert chante de toutes ses forces !
Dans cette partie est du Cambodge, il n’est pas rare de voir les paysans porter le foulard traditionnel khmer, à carreaux rouges et blancs, pour se protéger du soleil ou de la poussière. En voyant ces étoffes, on ne peut s’empêcher de songer que les Khmers rouges en avaient fait un symbole de leur uniforme. D’ailleurs, cela nous choque toujours un peu de voir des touristes affublés d’un de ces foulards khmers, ignorant toute la connotation imprégnée dans ce morceau de tissu…
De retour à Kratie, nous passons notre dernière soirée en compagnie et Tiphaine et Nicolas, autour d’un bon verre de vin dans le restaurant dans lequel travaille Sirivat (comme beaucoup au Cambodge, il cumule deux boulots, car son misérable salaire de prof – 60 dollars par mois – ne suffit pas).
Le lendemain matin, après 2 chouettes semaines passées ensemble, Tiph et Nico repartent pour Phnom Penh puis pour la France, nous précédant d’une dizaine de jours ! Pendant ce temps là, la vie s’anime sur le marché du bord de fleuve. L’occasion de vous présenter l’étrange tenue portée par beaucoup de femmes par ici : une sorte de pyjama, qui a l’air bien confortable, mais qui donne un peu l’impression qu’elles sortent juste du lit…
Il nous reste 4 jours au Cambodge, et nous décidons de remonter vers Stung Treng, pour aller voir un peu d’oiseaux ! Nous logeons dans une guesthouse faisant office d’école de formation d’hôtellerie (et d’anglais) pour de jeunes khmers venant des familles rurales pauvres. On redonne quelques leçons d’anglais et assistons à la cuisine, avant de prendre notre minibus pour Siem Pang.
Le village de Siem Pang, située le long de la rivière Sékong, est bien paumé, pas touristique du tout. D’ailleurs, on n’y trouve pas vraiment de restau, juste de petites échoppes vendant des plats préparés souvent peu appétissants.
Une IBA (important bird area) a été décrétée aux alentours du village, notamment pour y protéger l’Ibis de Davison (que l’on verra, mais sans photos à vous montrer). Au moins, ce site est accessible sans payer une fortune, ce qui est généralement le cas des autres sites ornithos du Cambodge. Et il est extrêmement riche ! Nous n’y resterons qu’une seule journée complète, suffisamment pour observer 80 espèces (sans oiseaux d’eau).
Pour aller nous promener dans les pistes chaotiques et sablonneuse de l’IBA, on loue notre dernière moto du voyage, snif !
On va aussi se balader de l’autre côté de la rivière, mais il nous faut emprunter le bac local, minimaliste !
Le point fort de la journée, hormis les Ibis, est l’observation de 9 espèces de pics et 5 de Perruches : le coin regorge d’arbres morts, idéal pour ces espèces. Un bel exemple de gestion ! (ou d’absence de gestion !). Parmi eux, le Pic striolé et le Pic à tête noire :
Autres espèces fréquemment rencontrées, le Loriot à capuchon noir, l’Alouette d’Indochine et le Pie-grièche à dos marron